La Bulgarie a connu sa semaine la plus vertigineuse des 25 dernières années de transition vers la démocratie. La crise politique, qui a commencé il y a tout juste un an par des manifestations en masse contre la constitution douteuse du gouvernement actuel, s’est accélérée à une vitesse inouïe après les élections européennes le 25 mai dernier et a déferlé cette semaine sur le pays au risque de provoquer une catastrophe.
La politique a perdu sa logique. Les institutions ont commencé à patiner, heurtées à cette sorte de poker des forces politiques sur la “démission” du cabinet Orécharski. Ou plutôt sur la date des élections législatives anticipées, inévitables déjà pour tous - pour ceux qui gouvernent, pour l’opposition, pour les experts et pour le peuple. Avec les manœuvres parlementaires et les tentatives de renvoyer la balle du parlement au premier ministre et au président pour ne pas assumer les responsabilités. Avec des passes de balle sur les élections - qu’elles soient en juillet, quand les gens sont en vacances ou sur les champs, ou vers Noël, quand il n’y aura plus de temps pour préparer le nouveau budget. Avec des coups bas entre partenaires, en ce qui concerne ceux qui soutiennent le gouvernement - il s’agit du Parti socialiste bulgare (PSB) et du Mouvement des droits et des libertés (MDL), et entre les gouvernants et l’opposition sur le sujet du “vote obligatoire” avec ou sans référendum. En changeant de discours du jour au lendemain et ne tenant pas aux paroles déjà prononcées, avec un comportement loin d’être celui d’homme d’Etat, en essayant même de déroger à la Constitution. Une semaine complètement folle, pleine de petites tricheries, où on n’entendait que les mots “démission” et “élections anticipées”. Et la démission? Elle est où ? Elle n’est toujours pas là. Ils voulaient bien des élections anticipées, non? Le premier ministre Plamen Orécharski ne donne pas sa démission car c’est le titulaire du mandat, le PSB, qui décide, quoi que, soi-disant, il la veuille, selon le chef des socialistes Sergueï Stanichev. Le MDL, partenaire dans la coalition gouvernante, la demande, mais ce n’est pas lui qui décide, il ne peut que “se conformer” au titulaire du mandat. L’opposition, elle, sans aucune influence au parlement, dans ce jeu schizophrène joue uniquement la carte de la “motion de censure” à l’encontre du gouvernement - logiquement inutile pour les gens raisonnables au cas d'une démission proche. Ainsi, au cours de cette semaine intense, à 100 à l’heure, le point culminant de l’absurdité a été atteint avec le cinquième vote de défiance, cette fois-ci pour la politique fiscale. Sans aucune surprise, on a assisté à un bombardement avec des chiffres «pour» et «contre». Sans aucune surprise, le gouvernement a été sauvé. Sans aucune surprise, le premier ministre Orécharski n’a pas démissionné. Au moins jusqu’à mardi, jusqu’à la réunion du Conseil consultatif à la sécurité nationale auprès du président de la République (le 17 juin). C’est la dernière carte qui est en jeu - que le chef de l’Etat mette de l’ordre dans l’Etat. S’il y a encore des hommes d’Etat dans le pays...
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