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„ La haine n’est qu’une défaite de l’imagination“

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Gregorij von Leitis, lit ses poèmes à la Synagogue de Sofia.
Photo: Ambassade d’Allemagne en Bulgarie

Cette citation de Graham Greene a présidé à la bouleversante soirée littéraire accueillie à la Synagogue de Sofia. Gregorij von Leitis et Michael Lahr ont lu des poèmes de déportés qui ont trouvé la mort dans un camp de concentration en Allemagne nazie. La traduction de ces poèmes avait été confiée à des jeunes des lycées de langue allemande de Sofia. Geste combien symbolique, par lequel les organisateurs de cet événement littéraire ont voulu rappeler le passé mais aussi faire face au présent qui véhicule le discours de la haine, plus encore ils ont voulu jeter un regard vers l’avenir en s’adressant à un public jeune. Vesséla Vladkova a rencontré Gregorij von Leitis, Michael Lahr et Valentin Pomakov, élève en terminale qui a traduit un des poèmes lus à la Synagogue.

Michael Lahr et Gregorij von Leitis

Les auteurs de ce récital poétique tombent par le plus grand des hasards sur les poèmes à New York, la ville qui accueille survivants de la guerre et membres rescapés des familles des victimes des camps de la mort. Dans les années 80, l’homme de théâtre Gregorij von Leitis et le philosophe Michael Lahr se mettent à la recherche des poèmes, mais l’idée des soirées littéraires à travers l’Europe naît après l’attentat de Charlie Hebdo, revient en arrière Michael Lahr.   

„La série d’attentats se poursuit mais elle n’est qu’un des motifs pour l’apparition de cette réunion littéraire. Le deuxième motif est le langage de la haine qui nous inonde ces derniers temps et l’hostilité grandissante l’égard des minorités. Pour moi il est très important de montrer que la haine n’est que l’absence d’imagination. C’est pourtant simple: il suffit juste de voir que ces artistes s’insurgent contre la haine qui les a jetés dans les camps de concentration et que c’est leur imagination qui s’est déversée dans ces poèmes! Cette résistance me donne l’espoir qu’involontairement ils nous ont suggéré comment combattre  aujourd’hui le langage de la haine. Nous ne devons pas nous laisser abattre, baisser les bras ou faire semblant de ne rien voir. Au contraire – nous pouvons nous opposer, réagir par l’art qui est ce qu’il y a de plus beau.“

Aux yeux de Gregorij von Leitis l’art est le moyen universel susceptible de transmettre aux jeunes la capacité de distinguer le bien du mal, de les aider à construire leur système des valeurs. „Il ne faut pas penser seulement à notre porte monnaie, notre âme a besoin de nourriture elle aussi“, dit von Leitis, qui, né pendant la guerre, a également pris part aux protestations des étudiants de 1968 et s’est engagé très fort dans le travail de reconsidération du passé nazi de l’Allemagne. 

 „ Les jeunes d’aujourd’hui sont merveilleux! Beaucoup cherchent des réponses, mais ne les trouvent pas parce qu’ils ne savent pas où chercher. Je pense que notre programme littéraire répond à leur quête. Les smartphones leur donnent des informations bien sèches, mais elles n’expliquent pas l’histoire. Or l’histoire ne peut être comprise et expliquée que par notre propre ressenti. Notre but est de donner du courage aux jeunes, de les laisser s’exprimer.“

Valentin Pomakov est en terminale d’un des lycées de langue allemande de Sofia. Il relève le défi de traduire un des poèmes, au début pour des raisons purement personnelles.

„ J’ai une toute petite expérience poétique. C’est pourquoi je n’ai pas pu résister à la tentation de traduire un de ces poèmes plutôt que d’en rédiger un. Cela fait des années que j’étudie l’ allemand et j’ai été très frappé par le ton délicat de ce poème dans lequel perçait même une certaine dose d’humour et d’ironie quand on pense combien sérieux et grave est le sujet. Je trouve des parallèles avec le monde actuel, mais j’essaie de ne pas trop m’y laisser prendre, parce que cela m’angoisse.“

Michael Lahr évoque d’autres parallèles: il vit entre Munich et New York et il observe avec inquiétude comment les déclarations racistes prononcées de la plus haute tribune politique en Amérique et en Europe peu à peu se banalisent.   

 „Les politiques formulent des choses qui, il n’y a pas longtemps étaient inconcevables. Plus encore – les simples gens  commencent à accepter le langage de la haine, certains même à s’y complaire. C’est comme ça qu’on ouvre grande la porte à la haine raciale. J’espère que de cette vague de protestation contre Donald Trump émergera une conscience nouvelle. J’avais cet espoir encore du temps du mouvement de  protestation „Occupy“ parce qu’il avait été lancé par des jeunes qui voulaient changer leur vie mais, hélas il n’a pas abouti.“

Version française Roumiana Markova




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