On connaît tous des histoires effrayantes sur les vampires qui errent dans les ténèbres et essaient de s’emparer de nous. Ces esprits sombres nous parviennent aujourd’hui par l’intermédiaire de la littérature et surtout du cinéma. En effet, beaucoup de chercheurs et ethnologues s’intéressent aux vampires dans le contexte du folklore. D’après eux, c’est dans les croyances populaires slaves que les vampires viennent au monde beaucoup de temps avant que l’Occident ne se rende compte de l’existence de Dracula.

Les représentations du vampire sont très variées en terres bulgares dès le 9^e siècle. Selon les croyances les plus populaires, le vampire habiterait une tombe qu’il quitterait après le coucher de soleil. Comme c’est un esprit sans os, il a le pouvoir de s’introduire par toute ouverture, y compris la serrure de la porte. Le plus souvent, il retourne dans la maison où il habitait de son vivant et il sème le trouble, tape sur le plafond, brise les assiettes, renverse les cruches, tue le bétail en s'abreuvant de son sang. 

La croyance dans les vampires existe encore et à certains endroits en Bulgarie on peut même entendre des histoires sur de vieux rituels et des vécus liés à la chasse aux vampires. 

L’ethnologue Viktoria Basham de l’Université de Salisbury, aux Etats-Unis, est venue en Bulgarie pour étudier les vampires du folklore bulgare. Elle se propose de rassembler et systématiser toutes les sources sur ce sujet. A ses dires, chasser les vampires fait partie intégrante des traditions bulgares qui pourtant ont été reléguées aux oubliettes et dénaturées dans les esprits car contaminée par les influences occidentales. Dans une interview accordée à Radio Bulgarie, la jeune chercheuse évoque l’énorme intérêt que suscite "le vampire folklorique" en Bulgarie comme à travers le monde :

"J'ai réussi à cerner un large éventail de propriétés du vampire bulgare : ce qu’il fait, son apparence, pourquoi il devient vampire, comment on peut s’en protéger. J’ai travaillé avec des ressources des archives de l’Institut d’Etudes folkloriques de l’Académie bulgare des Sciences et surtout sur les documents de Guéorgui Bontchev. J’ai rassemblé 396 témoignages et des sources primaires sur "le vampire bulgare folklorique". Il y a beaucoup de récits de "témoins", des témoignages de ces croyances, des contes populaires, des malédictions très intéressantes associées à ce sujet. J’ai essayé d’englober une période plus grande dans différentes régions du pays. L’étape finale du projet sera la mise en ligne d’une plateforme numérique qui fournira une description détaillée du vampire bulgare folklorique, en bulgare et en anglais, avec des liens vers beaucoup de sources intéressantes. On y trouve 12 illustrations originales de Miroslav Bonov (Mibo) créées d’après des récits réels et des descriptions de vampires."Sur cette carte numérique bilingue Viktoria Basham a marqué tous les endroits où elle a puisé ses sources qu’elle a accompagné d’informations utiles que le lecteur peut accéder rien qu’en cliquant sur l’endroit sur la carte.

D’après la chercheuse, les gens dans le passé croyaient vraiment dans les vampires, ils en avaient peur et voulaient s’en protéger.

"Une des raisons principales de la transformation de quelqu’un en vampire est sa vie amorale, remplie de travers. Le folklore donne une réponse à la question de savoir quelles sont ces personnes et quel est leur châtiment. Il y a également des limites et des normes établies pour protéger les vivants des vampires. C’est la raison pour laquelle il ne faut pas sortir tard la nuit ou se rendre à des endroits déserts, ne pas répondre si quelqu’un nous appelle par notre nom dans le noir et beaucoup d’autres choses de ce genre. Ces interdictions servaient de repères pour la société pour savoir ce qui est bon et se protéger des dangers cachés dans les ténèbres. Le vampire a donc aussi une fonction protectrice."

"Le vampire folklorique bulgare" est une des figures les plus durables, pluridimensionnelles et fascinantes de la tradition folklorique. Elle trahit une vision du monde, des croyances et des pratiques rituelles du peuple bulgare. Jusqu’au milieu du XXe siècle, les gens observaient très strictement des rituels pour éviter que quelqu’un ne devienne un vampire après la fin de ses jours. Qu’est-ce que cela nous dit ?

"Nous avons une énorme diversité de mesures de prévention pour ne pas permettre au corps mort de se transformer en vampire et d’autres quand on fait face déjà à un vampire,"explique l’ethnologue."Dans beaucoup de régions du pays, ces rituels sont toujours observés même s’ils ne sont pas directement liés aux vampires. Donc cette figure a réuni en elle des faits, des visions du monde et des tendances intéressantes associés à l’histoire, la culture et les croyances des différentes ethnies dans le pays. C’est cela l’image du vampire dans notre folklore."  

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Version française : Maria Stoeva

Photos : Guergana Mantchéva, bnt.bg